Notre Dame de la Couture | Cathédrale du Mans

138 religieux tués en 1944 dans le diocèse de Bayeux-Lisieux

Pour le 80e anniversaire du Débarquement, le diocèse de Bayeux-Lisieux organise plusieurs évènements mémoriaux dont une cérémonie à Bayeux le 8 juin 2024 en hommage aux 138 prêtres, séminaristes, religieux et religieuses disparus lors du Débarquement et de la Bataille de Normandie. Le P. Pascal Marie, curé de la paroisse Notre-Dame de l’Estuaire à Honfleur, les a recensés après un long travail de recherches historiques. Pendant vingt ans, il a analysé les archives pour redonner vie à ces visages oubliés.

 

 

« J’ai commencé un travail de recherche en m’intéressant au sujet des prêtres qui avaient accompli des faits de Résistance dans le Calvados pendant la guerre. » Voilà une vingtaine d’années que le Père Pascal Marie, s’est lancé, aidé de trois paroissiens dans l’histoire de la Bataille de Normandie. « Dans les différentes paroisses où j’ai exercé pendant 25 ans, les fidèles parlaient de curés qui avaient mené des actes de résistance. À part deux ou trois figures célèbres, le diocèse de Bayeux-Lisieux n’avait pas conscience de l’ampleur des pertes humaines. » Pour combler un manque criant, il a fallu, à ce moment précis de l’histoire, remonter le temps.

Point de départ de leurs recherches, La Semaine religieuse, un bulletin paroissial qui publie dès octobre 1944 une première liste avec le nom des victimes de la Seconde Guerre mondiale. « Nous disposions du nom des prêtres et des séminaristes tués ainsi que le nom des communautés touchées, mais cette liste était approximative », constate-t-il. À l’approche du 80e anniversaire du Débarquement Mgr Jacques Habert, évêque du diocèse de Bayeux-Lisieux, qui n’est pas originaire de la région, « a découvert le poids de l’histoire en Normandie et a compris l’importance du devoir de mémoire. » Il a ainsi missionné une équipe.

Des congrégations décimées

Le P. Pascal a établi une liste complète des personnes mortes pour la France. Ils sont prêtres, séminaristes, religieux et religieuses. Toutes victimes de la Seconde Guerre mondiale. Dans cette liste apparait 19 prêtres victimes de bombardements, exécutés, résistants, prisonniers, déportés ou qui ont caché des enfants juifs et 99 religieuses. « En février 2024, nous recensions 132 noms », explique-t-il. La liste des victimes s’est allongée, et pourrait l’être encore. « Le diocèse de Bayeux-Lisieux est celui qui a payé le plus lourd tribut pendant la guerre. » Notre-Dame du Pré, les Petites sœurs des pauvres et les sœurs de la Providence de Lisieux ainsi que les sœurs de la Miséricorde à Caen sont des congrégations décimées.

Au fil de son inventaire, le P. Pascal Marie a eu l’agréable surprise de découvrir des documents inédits : archives départementales, archives de congrégations religieuses, lettres manuscrites ou récits et témoignages etc… Non sans quelques obstacles. La première difficulté dans l’avancée de ses recherches, c’est le temps qui passe : « Après la guerre, les congrégations sont retombées dans l’oubli. Certaines d’entre elles avaient disparu ou fusionné, ce qui rendaient compliqué l’accès aux archives. » Dans certaines communautés « seules une ou deux religieuses avaient été tuées, la mémoire était plus diffuse. »  La double identité des religieuses : « l’une pour l’état civil et l’autre pour la vie monastique » a également considérablement ralenti son travail.

138 noms gravés dans la chapelle de la paix de la cathédrale de Bayeux

Une plaque avec les 138 noms gravés

Depuis quelques mois, le P. Pascal s’active dans les préparatifs du D-Day, effectue les trajets entre Bayeux et Honfleur. Samedi 8 juin 2024, une plaque commémorative avec les 138 noms gravés, sera dévoilée et bénie dans la chapelle de la paix de la cathédrale de Bayeux.  « Il fallait créer un lieu mémoriel pour tous ceux et celles qui n’ont pas de sépultures, la rencontre avec les familles de descendants a été bouleversante. L’absence de dépouilles a rendu le processus de deuil difficile. » Il s’agit aussi de leur rendre hommage et de les honorer. « Car les religieuses sont mortes – de par leur sacrifice – pour la France. C’est mentionné sur leurs actes de décès. »

Le Père a réussi son pari, celui de faire la lumière sur ces évènements. Son travail d’études et de recherche lui permet de comprendre le passé pour éclairer le présent. Rien d’étonnant, par conséquent, d’envisager une suite. En octobre 2024, il publiera un livret avec les biographies des 138 noms.